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En hommage à CHRISTIANE ROULET : les luttes dans les médias

Pour ce billet, nous avons choisi pour rendre hommage à Christiane Roulet, qui fut présidente de notre IHS de 2003 à 2008, de reproduire des extraits d’un billet paru dans La Tribune de janvier 2006.

Christiane y aborde la question du traitement médiatique des luttes, notamment celles des cheminots des 21 et 22 novembre 2005. Même après 17 ans, ces propos conservent toute leur acuité aujourd’hui.

« Il est des sujets que les moyens d’information n’abordent que lorsqu’ils sont dans leur phase d’expression la plus aiguë : celle qui les autorise à en traiter par la négative, par le côté le plus disqualifiant. […]
L’acharnement médiatique à vouloir estomper la vraie nature et le contenu social des conflits était patent. S’agissant des cheminots, le ton était le même sur toutes les chaînes de radio et télévision ou dans la presse, dénonçant tantôt le motif vague du conflit à propos de la privatisation rampante, tantôt ironisant sur le thème des revendications pléthoriques (23, affirmaient-ils, mais sans jamais en citer aucune !).
Le phénomène n’est pas nouveau et prend place dans ce qui s’appelle la bataille des idées, encore que le côté donneur de leçon qui s’y ajoute désormais ait atteint des sommets. On peut s’en irriter à bon droit, s’en étonner certainement pas. Il y a belle lurette que les grands moyens d’information, les pouvoirs d’information, font corps avec le pouvoir politico économique. L’histoire sociale, celle des grèves en particulier, fourmille d’exemples sur le traitement unilatéral de l’actualité sociale et sur la pratique de l’analyse hâtive pour céder à l’urgence ou d’édulcorer le travail d’investigation journalistique (lorsqu’il existe). Il suffirait pour s’en convaincre de consulter a posteriori les titres de presse à l’occasion de chaque mouvement social.
Si les formules changent (et encore, pas tant que cela), le fond demeure : les revendications sont irréalistes ou égoïstes, les grévistes attachés à des avantages archaïques, les syndicats dépassés ou politisés, les grèves font des otages et sont le fait de privilégiés… Sans relâche nous n’avons pas d’autre parade à cette désinformation que d’informer avec nos moyens, qui sont sans aucune mesure certes, mais pas sans effet, sinon comment expliquer, par exemple, le mouvement de 95 évoqué dans la Tribune précédente et bien d’autres dans notre histoire passée ou récente. »

Photo : Christiane Roulet en 2015 – © IHS CGT Cheminots.